Le sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC) s’ouvre ce jeudi 14 novembre au Pérou. Cet événement offre l’occasion au président chinois Xi Jinping, participant au sommet, d’inaugurer le premier mégaport commercial contrôlé par la Chine en Amérique latine, symbolisant l’intérêt croissant de Pékin pour cette région.
Longtemps considérée comme le domaine réservé des États-Unis, l’Amérique latine attire désormais Pékin presque autant que l’Afrique. Le port de Chancay en est un exemple frappant. Situé au Pérou, l’une des économies les plus dynamiques de la région, ce terminal bénéficiera également au Chili, à la Colombie et à l’Équateur, leur permettant de se passer des ports mexicains et américains.
Les imposantes silhouettes des grues du nouveau mégaport de Chancay, au nord de Lima, illustrent l’envergure de cette infrastructure financée par la Chine, conçue pour renforcer l’influence du géant asiatique en Amérique du Sud. Preuve de l’importance de ce projet, le président Xi Jinping devait inaugurer l’installation ce jeudi 14 novembre en marge du sommet de l’APEC à Lima.
Chancay sera le premier port contrôlé par la Chine en Amérique du Sud. Situé à environ 80 km de la capitale péruvienne, il comportera quatre quais dans sa première phase, grâce à un investissement de 1,3 milliard de dollars. À terme, le port comprendra 15 postes d’amarrage, après un investissement total de 3,5 milliards de dollars. Le terminal en eau profonde (près de 18 m), dont la construction a commencé en 2021, pourra accueillir les plus gros porte-conteneurs du monde, capables de transporter jusqu’à 24 000 conteneurs.
Un cheval de Troie pour la Chine
Le port s’inscrit dans l’initiative des « Nouvelles routes de la soie », un programme majeur lancé en 2013 visant à construire des infrastructures et à développer les liaisons maritimes, routières et ferroviaires entre les continents, en particulier dans les pays en développement.
Plusieurs pays d’Amérique du Sud, dont le Pérou, l’Argentine, le Chili, la Bolivie, l’Équateur et le Venezuela, ont déjà rejoint cette initiative, qui constitue un pilier de la stratégie de Xi Jinping pour renforcer l’influence chinoise à l’étranger. Chancay, petite ville de quelque 57 000 habitants, a été choisie en raison de sa position stratégique au centre de l’Amérique du Sud. Connecté à l’autoroute panaméricaine, qui traverse le Pérou du nord au sud, par un tunnel de 1,8 km, le mégaport intègrera des technologies d’intelligence artificielle, notamment pour le contrôle des marchandises.
Des échanges en pleine croissance
Le Pérou importe de Chine divers biens de consommation et exporte en retour des matières premières et des minéraux. La Chine contrôle un tiers des entreprises minières du pays. Les échanges commerciaux entre le Pérou et la Chine ont atteint près de 36 milliards de dollars en 2023, grâce notamment à un accord de libre-échange conclu en 2010.
La Chine est également le premier exportateur de lithium raffiné et cherche à sécuriser son approvisionnement en matières premières en exploitant les gisements situés en Argentine, au Chili et en Bolivie.
De plus, l’Amérique latine représente un marché important pour les produits chinois. Les échanges commerciaux entre la Chine et la région ont été multipliés par 35 au cours des vingt dernières années, atteignant près de 500 milliards de dollars en 2022.
Les États-Unis et les Européens sur le qui-vive
L’expansion de la Chine en Amérique latine est surveillée de près par Washington, qui a longtemps considéré cette région comme sa « chasse gardée ». Les intérêts américains y sont centrés sur les matières premières, ainsi que sur la délocalisation de certaines activités, notamment au Mexique. L’Amérique latine joue également un rôle clé dans les routes commerciales stratégiques, notamment celles menant au Pacifique. L’administration Trump promet déjà de s’opposer fermement à l’influence croissante de la Chine.
Du côté européen, l’UE mène des négociations tendues pour l’adoption d’un accord avec le Mercosur, jugé nécessaire pour contrer la concurrence chinoise. Cependant, cet accord prévoit des réductions de droits de douane sur les produits latino-américains, notamment agricoles, ce qui suscite de vives critiques, notamment en France.
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